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Les familles catholiques dans la rue

Retour sur l’interdiction des messes en public pendant le deuxième confinement, qui a entraîné une vive réaction de la part des familles catholiques. Un vrai signe d’espérance.

Fin octobre 2020, face à la recrudescence de l’épidémie de coronavirus, le gouvernement annonce un deuxième confinement. Il est certes plus allégé mais il y a à nouveau interdiction de célébrer la messe en public. Après les deux mois de « jeûne de messe » subis lors du premier confinement, les fidèles se rebellent et s’organisent pour ne pas dépérir faute de nourriture spirituelle, mais aussi pour sensibiliser la hiérarchie ecclésiastique. Oui, pour ces catholiques, la messe est essentielle, on ne peut pas les priver une nouvelle fois de la Présence réelle pour raison sanitaire ! La réaction s’est faite sur deux volets : devant les tribunaux et dans la rue.Messe

Tout d’abord, une défense juridique est mise en place. Un premier référé-liberté (demande de jugement en urgence) est déposé devant le Conseil d’Etat. Ce dernier confirme malheureusement dès le 7 novembre l’interdiction des célébrations publiques de messes au motif de protection de la santé publique. Une concertation avec les responsables des cultes en France est alors proposée. Elle aboutira au statu quo : pas de messe en public. Dans le même temps, une pétition est lancée qui recueille plus de 50 000 signatures en 24 heures.

Lors de la levée du confinement, fin novembre, le gouvernement permet enfin la célébration des messes mais avec une assistance limitée à 30 personnes quelle que soit la taille de l’édifice : vaste supercherie ! Un deuxième référé est donc déposé par la Conférence des évêques de France, poussée par sa base, et par d’autres associations, pour demander au Conseil d’Etat de casser cette jauge absurde. Le 29 novembre, les Sages donnent raison aux demandeurs en reconnaissant que cette limitation est une atteinte à la liberté de culte. De là, un nouveau protocole sanitaire respectant tous les gestes barrières et la distanciation est mis en place dans les églises et les fidèles peuvent retourner assister à l’office dominical.

Pendant cette période, de nombreux autres référés-libertés ont été engagés à la suite des refus de plusieurs préfectures d’accorder la liberté de manifester, de prier dans l’espace public ou de dire la messe en plein air, en prétextant l’urgence sanitaire ou le caractère religieux de ces manifestations. Citons ainsi la décision du tribunal administratif de Clermont-Ferrand où le juge a donné raison en première instance à la demande de la Fraternité Saint-Pie X, en énonçant qu’un préfet ne peut pas interdire par principe une manifestation sur la voie publique au seul motif que celle-ci serait à but religieux1 (malheureusement le préfet utilisa ensuite le motif sanitaire pour l’interdire). Arguant de cette jurisprudence, la Fraternité a permis la tenue de l’unique messe (à notre connaissance) dans l’espace public le dimanche 29 novembre pour la plus grande gloire de Notre-Seigneur, bafoué dans ses propres droits ! Honneur à elle et à ses courageux célébrants !

Face à ces interdictions du début, naît un vaste mouvement de protestation des catholiques. Pour certains d’entre eux, il n’est pas question de se soumettre à cette dictature sanitaire et de subir encore l’absence de l’Office divin. Des rassemblements spontanés mais déclarés (les catholiques sont de bons citoyens) naissent peu à peu sur tout le territoire français, après Nantes, Paris et Versailles qui furent les pionnières. Souvent à l’initiative de jeunes qui utilisent les réseaux sociaux pour mobiliser plusieurs centaines de personnes en une journée, comme cela s’est vu à Versailles. Ainsi, tous les dimanches du mois de novembre, des catholiques (les jeunes et les familles) sont allés battre le pavé devant les églises et cathédrales pour demander la liberté de culte et le retour des messes. Saluons le courage et la réactivité de ces jeunes étudiants qui ont lancé l’association « Objectif Messe » qui fut à l’initiative de la pétition et de nombreuses manifestations plus ou moins soutenues par le clergé local.

AngersmavilleEt ce fut heureux. Grâce à eux, les Français ont ainsi pu entendre, sur la place publique, des discours magnifiques célébrant la beauté et la nécessité de l’Eucharistie, l’importance d’assister physiquement au miracle de la Présence réelle. En plein confinement, les catholiques ont prié dans la rue. Sur les places de France ont retenti des Je Vous salue Marie chantés par une foule indignée et déterminée.

Ces événements nous montrent le niveau de déchristianisation de la société et d’ignorance de nos dirigeants sur l’importance de la messe : non, un vrai catholique ne peut se satisfaire de regarder tranquillement sa messe du dimanche depuis son canapé !

Cette situation a eu le mérite de forcer les évêques de France à se positionner et a mis en lumière les divergences fondamentales en leur sein. Heureusement, plusieurs d’entre eux ont réagi rapidement, comme Mgr Ginoux, qui appelait tous ses fidèles à se rendre dans leurs églises le dimanche, ou Mgr Aillet qui « tweetait » après l’annonce de la jauge : « Sur quels critères allons-nous sélectionner les 30 heureux élus qui seront autorisés par M. Macron à participer à la messe ? » Acculée, la Conférence des évêques de France s’est trouvée obligée de prendre parti et de s’opposer au gouvernement, mais quelle mollesse et quelle lenteur !
Dans les paroisses, de belles initiatives ont fleuri, les adorations eucharistiques se sont multipliées. Les pasteurs se sont rendu compte de l’importance de la formation doctrinale pour leurs ouailles : si elles se satisfont de la « télémesse », il y a donc un manque à combler. Ainsi, Mgr Batut, évêque de Blois, qui rappelle qu’« une catéchèse approfondie est urgente et indispensable dans nos communautés pour rappeler ce qu’est la messe et le lien entre le rassemblement du Corps ecclésial et la réception du Corps eucharistique du Seigneur »2, saine prise de conscience !

Au final, ce mouvement a mis en lumière une fracture sous-jacente dans l’Eglise de France entre les « cathos-bobos » qui placent la santé du corps avant la santé de l’âme et les « cathos-réels » qui ont compris l’importance du Saint Sacrifice de la messe et qui savent que c’est un besoin vital d’y assister et d’y recevoir Notre-Seigneur réellement présent dans l’Eucharistie. Ce mouvement a aussi étonné le gouvernement par sa résistance et sa capacité de mobilisation rapide. Les gentils cathos – qui ne font pas de vagues – ont osé se rebeller (certes en toute légalité). Une vraie force de frappe s’est mise en place en un temps très court sans qu’il ne l’ait prévu. Et pour nous, familles catholiques, ce fut l’occasion d’une belle leçon de courage et d’engagement pour nos enfants. Nous leur avons montré l’importance de revendiquer publiquement notre Foi, de demander à mettre fin à une injustice, de réparer publiquement cette offense faite à Dieu, de se battre pour défendre le Saint Sacrifice de la messe, trésor et centre de notre foi. Certes, nous sommes loin d’être les chouans se cachant et risquant leur vie pour assister à la messe au fond des bois mais l’exemple du combat et de la dévotion à l’Eucharistie est important pour notre jeunesse.

Enfin, ce fut une victoire, soulignons-le (elles sont suffisamment rares !) puisque, outre la mobilisation obligée des évêques, la fameuse jauge a été cassée. Le gouvernement n’a pas osé toucher à la fête de Noël lors des restrictions suivantes de couvre-feu, et ce malgré les directives de l’Union européenne. Nos manifestations ont été permises presque partout et à chaque fois !

Les familles et la jeunesse catholique étaient présentes dans la rue, signe d’espérance, la relève est là ! Au-delà des débats doctrinaux, une partie des catholiques a su se mobiliser ensemble dans l’adversité, contre la dictature sanitaire au service du laïcisme. Le combat ne fait que commencer mais les troupes ont répondu à l’appel !


1. Décision n°2002065 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand, en date du 21 novembre 2020.
2. Communiqué de Mgr Batut, le 9 novembre 2020.