Se constituer un patrimoine
Les Français aiment passionnément l’immobilier. C’est un amour démesuré, excessif. Un amour qui vient de loin. La France est un pays de propriétaires fonciers et, jusqu’à une époque pas si lointaine, l’investissement immobilier était peu fiscalisé. Aujourd’hui, le poids des impôts est tel qu’investir dans la pierre est moins rémunérateur qu’on ne le pense. Pour se constituer un patrimoine, il faut donc diversifier ses placements, ne pas avoir peur de recourir à l’emprunt et éviter les produits défiscalisants tels que le Pinel.
Le piège du tout immobilier
Quand il est question d’immobilier, les Français ne raisonnent plus avec leur tête ! Ils sont tellement attachés à ce placement que leurs parents et leurs grands-parents ont fait avant eux qu’ils en oublient les raisonnements rudimentaires à appliquer. Alors, c’est vrai, leurs parents et leurs grands-parents ont souvent fait de bonnes affaires mais ce ne sera pas forcément le cas pour eux car la donne a changé.
Il faut tenir compte des paramètres financiers, fiscaux et juridiques d’aujourd’hui et pas d’il y a 70 ans. Ce qui a fonctionné pour les générations précédentes ne fonctionnera pas forcément à l’identique. Par exemple, les impôts fonciers rognent la rentabilité. Nos arrière-grands-parents ne connaissaient ni impôt sur les revenus fonciers, ni même l’Impôt sur la Fortune Immobilière ; les successions étaient faiblement taxées et les locataires étaient moins protégés qu’aujourd’hui.
Plus près de nous, ceux de nos parents ayant des revenus fonciers n’avaient pas à payer 17,2 % de prélèvements sociaux. C’est une taxe dont on sous-estime souvent le poids. Attention, ces fameux prélèvements sociaux ne sont pas progressifs et doivent être payés en totalité dès le 1er euro de loyer encaissé. Pour ceux qui sont dans une tranche d’impôt sur le revenu de 30 %, cela veut dire que près de la moitié des loyers versés par leurs locataires partira en impôts et taxes…
Bien sûr, investir dans l’immobilier n’est pas une mauvaise idée mais il faut y regarder à deux fois. Par ailleurs, l’immobilier ne peut pas représenter la totalité d’un patrimoine car ce placement n’est pas sans risque et il est illiquide par fraction. Vous ne pouvez pas vendre 2 m2 si vous avez besoin de liquidités. Il faut donc garder des liquidités et les investir ailleurs. À l’inverse, une personne d’environ 40 ans touchant un salaire, qui n’a ni immobilier, ni crédit dans son patrimoine, fait une erreur.
Les bonnes questions à se poser pour investir
Mon raisonnement est-il vraiment économique ?
Il est important de se méfier de l’affect dans la constitution de son patrimoine. Les épargnants ne doivent pas en avoir pour les placements, qu’ils soient financiers ou immobiliers. Il importe de ne jamais se laisser guider par ses émotions car c’est la porte ouverte aux mauvaises affaires.
En effet, on peut perdre de l’argent avec l’immobilier qui n’est pas un placement sécurisé, contrairement au marketing et autres publicités qu’on en fait. Ceux qui ont investi dans un quartier qui s’est dégradé et qui revendent à perte quinze ans plus tard l’ont compris à leurs dépens.
Suis-je assez endetté ?
Même si vous avez assez de liquidités pour acheter un bien locatif, ne le payez pas comptant. Profitez du levier de crédit, l’immobilier est le seul actif qui le permet. Par exemple, un emprunt sur dix ans (durée de garde pertinente minimale d’un bien) se paye aujourd’hui à environ 3,40 % d’intérêts. En investissant vos capitaux pour cette même durée sur les marchés financiers vous pouvez espérer une performance raisonnable de 4 % par an en moyenne. Donc, placez votre épargne sur une allocation diversifiée construite en fonction de vos projets de vie et présentant un risque maîtrisé. Et si dans l’intervalle vous avez besoin de liquidités, vous pourrez en retirer, ce qui sera impossible si vous avez investi votre cash dans l’immobilier. Pour l’emprunt, il faut qu’au maximum les loyers mensuels que vous percevez remboursent les échéances mensuelles.
En empruntant, vous pourrez déduire vos intérêts d’emprunt de ces loyers, ainsi la base imposable sera plus faible et votre épargne servira à rembourser votre crédit si le loyer reçu n’y suffit pas.
Donc, d’un côté vous achetez le bien locatif à crédit à taux encore faible et les loyers gagnés remboursent les échéances mensuelles (au maximum…) et de l’autre, vous placez vos capitaux avec une liquidité non négligeable et une fructification intéressante.
Le rendement est-il aussi bon que je le crois ?
Un rendement à deux chiffres n’est pas forcément une bonne nouvelle. Le rendement, c’est la contrepartie d’un risque. Si vous avez du mal à trouver un locataire parce que le marché locatif est mauvais, si vous revendez ce bien en perdant de l’argent, ce rendement ne rime à rien.
Regardez non seulement le rendement mais aussi le potentiel de plus-value. À Paris, le rendement d’un logement est faible, il oscille généralement entre 1 et 2 % ; en contrepartie vous avez un espoir de plus-value à long terme important. Dans les grandes villes de province, le rendement tourne entre 4 et 6 %, le potentiel de plus-value est sans doute moindre. Dans certaines villes plus petites, vous pouvez trouver des rendements bien plus élevés mais la plus-value risque de ne pas être au rendez-vous et les locataires pas toujours non plus. Même en immobilier, le couple infernal rendement/risque s’applique.
Acheter seulement pour réduire mes impôts ?
On ne construit pas un patrimoine avec une lecture fiscale. C’est pourtant la motivation première des épargnants qui investissent en construction neuve ou en résidences étudiants, services, seniors. Aveuglés par l’économie fiscale, beaucoup oublient de regarder ce que vaut leur investissement. Ils réalisent leur erreur des années plus tard quand ils décident de revendre leur appartement, par exemple au même moment que leurs voisins (l’échéance des avantages fiscaux arrivant à sa fin) et à des prix souvent inférieurs à ce qu’ils espéraient, ayant notamment acheté plus cher que le marché. Il existe de bons investissements Pinel, mais ils sont rares.
Mieux vaut souvent, une fois trouvé un bien locatif, réfléchir à la manière d’investir : ce peut être via une société civile immobilière (SCI) ou avec le statut de loueur en meublé non professionnel (LMNP) quand on veut réduire la fiscalité.
Appuyez-vous sur des professionnels qui vous aident à trouver un bien locatif, plutôt dans l’ancien avec des travaux. Il est important de choisir ceux qui connaissent les artisans et le marché local. L’immobilier, c’est un marché de terrain, il faut aller dans la ville dans laquelle on investit, sans pour autant chercher à investir dans une ville qu’on apprécie forcément ; ça aussi c’est un biais, et les biais, on n’aime pas.
Pourquoi emprunter ?
Vous l’avez compris, un achat immobilier ne se fait pas sans le crédit : empruntez au maximum de votre capacité d’endettement ! La plupart des gens contractent un emprunt pour acheter un bien immobilier et c’est une bonne option. Mais certaines personnes sont effrayées par cette idée. Par conséquent, elles se constituent un apport démesurément élevé. Ce dernier doit représenter entre 10 % et 15 % du prix de votre bien, jamais plus si possible.
Utiliser le levier de la dette pour se constituer un patrimoine immobilier. Grâce au levier de la dette, vous pouvez financer votre achat immobilier avec une petite partie de votre épargne et emprunter tout le reste. Les échéances mensuelles sont un effort d’épargne qui constitue un levier non négligeable, le capital non utilisé peut être investi par ailleurs. Il y a un double effet pour se constituer un patrimoine.
Dans le cas d’un investissement locatif, vous vous retrouvez avec une maison/un appartement qui vaut bien plus que ce que vous avez déboursé de votre poche. Et de plus, n’oubliez pas que l’assurance-crédit associée est une sorte de prévoyance.
Le long terme est votre meilleur allié pour valoriser votre bien. L’immobilier a tendance à prendre de la valeur avec le temps (attention à avoir une détention moyen/long terme, comme tout investissement il n’y a pas de “coup” à faire sur le court terme). Les intérêts que vous remboursez à la banque peuvent ainsi être couverts par la prise de valeur du bien.
La peur de l’endettement est naturelle mais se priver du crédit immobilier, c’est passer à côté de belles opportunités d’investissement. Si vous avez pour projet d’acheter un bien immobilier mais que vous endetter vous fait peur, il est fortement conseillé de faire appel à un professionnel, en la personne du courtier crédit. Celui-ci vous accompagnera dans la recherche de votre bien, la constitution de votre dossier d’emprunt, le calcul de votre capacité d’endettement et bien plus encore.