Apologie de la Tradition
Après Vatican II. Une histoire à écrire, Roberto de Mattei persiste et signe avec l’Apologie de la Tradition où histoire et théologie se rejoignent pour dénoncer les erreurs modernes et demander au Souverain Pontife la publication, rendue « chaque jour plus urgente et nécessaire d’un nouveau Syllabus ou une nouvelle Professio fidei, doublée de la condamnation des erreurs répandues. »
L’Eglise militante dans les heures les plus difficiles
L’Apologie de la Tradition se divise en deux parties. La première intitulée « L’Eglise militante dans les heures les plus difficiles », est une vaste fresque historique en douze points exposant les crises internes de l’Eglise depuis sa naissance jusqu’au pontificat de Léon XII. Cette fresque est réalisée à partir de deux ouvrages de référence hautement appréciés de Léon XII et saint Pie X : L’Histoire universelle de l’Eglise du cardinal Joseph Hergenröther et l’Histoire des papes depuis la fin du Moyen-âge du baron Ludwig von Pastor.
Dans son douzième point « la barque de Pierre surmonte toutes les tempêtes » et qui sert de transition avec la deuxième partie, Roberto de Mattei confesse le dogme de la primauté universelle du Pontife romain mais rappelle que le pape n’est pas infaillible lorsqu’il exerce son pouvoir de gouvernement ou quand il propose une doctrine de manière non définitoire. Dans «l’époque dramatique» qui est la nôtre, il appelle les persécutés d’aujourd’hui à «défendre avec toutes leurs possibilités intellectuelles et civiles l’Eglise et la civilisation chrétienne, et à élever avec la bannière de la Croix, celle de la Tradition catholique.»
La Regula fidei de l’Eglise dans les époques de crise de la foi
La deuxième partie davantage théologique et intitulée « la Regula fidei de l’Eglise dans les époques de crise de la foi » revient en vingt deux points sur la crise actuelle de l’Eglise puis la compréhension exacte des notions clés telles que la Tradition, le Magistère, l’infaillibilité et le Sensus fidei.
Le professeur de Mattei rappelle avec justesse comment la Tradition, c’est à dire ce dépôt de la foi enseigné par Jésus-Christ et fidèlement transmis par l’Eglise, a été rejetée par les théologiens modernes au profit d’une « Tradition active » faussement identifiée au Magistère de l’Eglise lequel n’est autre que le pouvoir d’enseignement de l’Eglise.
A cet égard, il dénonce la théorie de « l’herméneutique du sujet », issue du subjectivisme propre à la pensée moderne dans laquelle le sujet connaissant prévaut sur le fait objectif à connaître et qui affirme que le « Magistère vivant » devient la règle herméneutique de la Tradition inaugurant par là même une chaine herméneutique interminable : si la Tradition a besoin d’être interprétée par le Magistère, qui interprète le Magistère ? Et si c’est le pape qui doit interpréter le Magistère, qui interprète le pape ?
Il met aussi en évidence les faiblesses et même l’échec de la théorie de « l’herméneutique de la continuité » tant il est vrai que « l’affirmation selon laquelle le concile Vatican II doit être pris dans sa continuité avec le Magistère de l’Eglise présuppose en fait l’existence de passages douteux ou ambigus, dans les documents conciliaires, nécessitant une interprétation.»
Le point fort de cette partie reste sans doute le point n°16 dans lequel Roberto de Mattei rappelle sans ambages, l’obligation grave pour les fidèles et dans certains cas exceptionnels, de « refuser leur assentiment à certains documents ecclésiastiques et même de se mettre contre les autorités suprêmes dans une position de résistance ou de désobéissance apparente. » Ce rappel qui fait écho à la conclusion de la première partie, prend toute sa force à la lecture du dernier paragraphe de la postface que nous citons in extenso : « Le concile de Benoît XVI est sorti de l’histoire et, dans l’histoire, est resté le concile de son adversaire, le cardinal Kasper, un concile qui se réalise dans la praxis pastorale et qui, après cinquante ans de praxis pastorale, annonce la liquidation advenue de la morale catholique. Le prochain Synode des évêques devrait en prendre acte. »
Editions de Chiré - 17€ - 172 p.
Traduit de l'italien par Philippe de Lacvivier